Les "escalators vers l'extinction" en montagne sont-ils un mythe ? Podcast By  cover art

Les "escalators vers l'extinction" en montagne sont-ils un mythe ?

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L’expression « escalator vers l’extinction » évoque une image forte : celle d’une espèce qui, confrontée au réchauffement climatique, est contrainte de monter toujours plus haut en altitude pour survivre — jusqu’à ce qu’elle atteigne le sommet… et qu’il n’y ait plus nulle part où aller. Un scénario tragique et apparemment inéluctable. Mais cette idée est-elle solidement étayée par les faits ? Selon une récente étude menée par une équipe franco-taïwanaise, notamment du CNRS, la réponse est : pas encore.


Ce concept, souvent utilisé dans les médias et certaines publications scientifiques, repose sur une hypothèse simple : dans les écosystèmes montagnards, les espèces sensibles aux variations de température migrent vers des altitudes plus élevées pour conserver des conditions climatiques adaptées. Mais comme les montagnes ont une hauteur limitée, cette stratégie de survie a une fin. Une fois atteinte la cime, aucune nouvelle niche écologique n’existe au-dessus. L’espèce est alors condamnée à disparaître.


L’image est parlante… mais les données sont moins convaincantes. Les chercheurs franco-taïwanais, dans un article publié en 2024, soulignent que les preuves empiriques de ce mécanisme sont encore très limitées. Sur les quelque 400 études examinées, très peu démontrent que des extinctions effectives ont été causées directement par cette dynamique verticale.


Pourquoi un tel décalage entre l’image et la réalité ? D’abord, les espèces montagnardes disposent parfois de capacités d’adaptation insoupçonnées : certaines modifient leur comportement, leur alimentation, ou leur microhabitat. Ensuite, la montagne est loin d’être un environnement uniforme. Les versants orientés différemment, les zones ombragées ou les creux humides peuvent offrir des refuges thermiques, retardant — voire empêchant — l’extinction.


Autre point : l’évolution ne s’arrête pas face à la montée des températures. Des adaptations génétiques peuvent émerger, notamment chez les insectes, amphibiens et plantes, à des rythmes parfois étonnamment rapides. Enfin, il est crucial de prendre en compte l’impact des activités humaines : fragmentation des habitats, pollution, tourisme… Ces facteurs, bien souvent, pèsent davantage que la seule élévation thermique.


En conclusion, le concept d’« escalator vers l’extinction » reste pertinent en théorie, mais son application dans le réel demande à être nuancée. Il s’agit moins d’un mécanisme universel que d’un scénario parmi d’autres, dépendant fortement des caractéristiques biologiques des espèces concernées et de la complexité du terrain. Une alerte utile, mais à manier avec prudence pour ne pas simplifier à outrance les défis de la biodiversité en montagne.

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